Les Pentes de la Croix-Rousse misent sur un guide local pour soutenir l’économie de proximité
Lyon Éco et Culture, partenaire média de la Vitrine des Pentes #cityGuide #laVitrinedesPentes #boutiquespentescroixrousse #PresquîleLyon
City Guide des Pentes : 150 adresses locales pour consommer autrement dans les Pentes de la Croix-Rousse
Ce guide de La Vitrine des Pentes offre un parcours authentique au cœur des Pentes, entre commerce indépendant, création et culture locale.
À contre-courant de la standardisation commerciale, un quartier de Lyon expérimente une stratégie de redynamisation économique fondée sur la coopération, la visibilité partagée et l’ancrage local. Le nouveau City Guide des Pentes en est la boussole.
Ce samedi 19 juillet à Lyon, un curieux cortège sillonnait les rues du centre-ville : un vélo cargo rempli de guides colorés, une mascotte à vélo, des haltes joyeuses sur les places emblématiques de la ville.
De la Croix-Rousse à Confluences, l’opération de lancement de la 4e édition du City Guide a mobilisé commerçants, habitants, passants et institutions autour d’un objet à la fois modeste et ambitieux : un petit livre de 100 pages, reflet d’une stratégie économique locale innovante.
Le City Guide des Pentes, porté par l’association La Vitrine des Pentes, ne se contente pas de répertorier des adresses. Il incarne une vision du commerce fondée sur la coopération, l’identité territoriale, la narration collective et la résistance à la logique des plateformes.
Dans un contexte de fragilisation généralisée du commerce indépendant, ce guide devient un cas d’école. Il documente, structure et amplifie une dynamique locale puissante, souvent invisible aux yeux des décideurs économiques.
Né en 2021 dans le sillage de la crise sanitaire, le guide est d’abord un geste de survie.
« Les commerces dits “non essentiels” étaient fermés, marginalisés. On a voulu se rendre visibles, montrer qu’on était le cœur battant du quartier », raconte Nelly Sitbon, directrice artistique et présidente-fondatrice de La Vitrine des Pentes.
Trois éditions plus tard, l’initiative est devenue un projet de territoire à part entière, fédérant 150 établissements – soit environ 33 % du tissu économique des Pentes de la Croix-Rousse.
Cette portion du 1er arrondissement de Lyon, nichée entre la Presqu’île (un des plus grands quartiers commerçants en plein air d’Europe) et le plateau, est un terrain fertile pour l’expérimentation.
Historiquement marquée par les canuts, les luttes sociales, les circuits courts et les cultures alternatives, elle abrite aujourd’hui une concentration inédite de
- commerces indépendants,
- d’ateliers de créateurs,
- de cafés hybrides,
- de lieux culturels
- et de services engagés.
Le City Guide cartographie cette richesse. Il classe les adresses par parcours d’usage et d’émotions : “Craquez”, “Sirotez”, “Dégustez”, “Partagez”, “Vibrez”…
Chaque page met en lumière les singularités d’un lieu :
- fabrication locale,
- accessibilité,
- éco-conception,
- artisanat,
- mixité des publics.
Un QR code renvoie vers la version anglaise, pensée pour les touristes. Une carte interactive permet de suivre l’actualité du quartier tout au long de l’année.
Mathilda, personnage fictif et égérie du guide, incarne l’esprit libre et curieux des Pentes, guidant le lecteur avec poésie.
Mais l’innovation réelle est ailleurs : dans le modèle économique que le guide promeut.
L’association bénéficie certes de subventions de la ville de Lyon, (Mairie du 1er), de partenariats privés (Crédit Agricole, Omnium) et de mécènes locaux mais le financement du city guide se fait essentiellement par les cotisations de ses adhérents.
Elle est produite collectivement, mise à jour avec les commerçants, et distribuée selon une logique de réciprocité : certains établissements proposent des surprises à ceux qui présentent le guide. Une manière de valoriser les clients locaux comme une communauté, non comme une cible.
Cette logique décentralisée, coopérative, sans intermédiation numérique, s’oppose frontalement aux modèles dominants de consommation. Pas de plateforme, pas d’algorithme, pas de commissions. Le City Guide ne vend rien : il met en relation, il oriente, il raconte.
« Ce n’est pas un produit de com’, c’est un outil de structuration économique », résume Simon Faure, chargé de développement.
« Il permet à des commerces isolés de se penser comme un réseau, de mutualiser la visibilité, de créer une identité commune. »
Le lancement du 19 juillet a illustré la force de cette approche. En sept étapes – de la place de la Croix-Rousse à Confluences – le convoi a distribué plusieurs milliers d’exemplaires. L’accueil a été enthousiaste.
Des passants curieux, des riverains fiers, des commerçants mobilisés. « C’est notre carte d’identité collective », confie la gérante d’un café de la Grande Côte. « C’est ce qui fait qu’on existe autrement que sur Google Maps. »
Le succès du guide, au-delà de l’effet vitrine, repose sur une intuition juste : dans un monde saturé d’images, de flux et de marchandisation, ce qui fait la valeur d’un commerce, c’est sa capacité à créer du lien. Pas seulement vendre un produit, mais incarner une histoire, un lieu, une éthique, une communauté. Le City Guide catalyse cette économie du récit.
À l’échelle économique, ce type de projet pose des questions majeures :
- peut-on revitaliser un centre-ville sans recourir à la franchise ou au flagship ?
- Peut-on soutenir les indépendants sans dépendre de plateformes ?
- Peut-on faire du marketing territorial sans marketing de masse ?
À Lyon, les Pentes de la Croix-Rousse esquissent des réponses. Modestes, mais tangibles.
La 4e édition du City Guide n’est donc pas un gadget. C’est un levier. Un prototype de politique économique locale à l’échelle micro-urbaine. Il dessine les contours d’un commerce post-industriel, ancré dans le vivant, la coopération, et la création de valeur non spéculative.
Dans cette colline qui fut jadis un bastion ouvrier, on réinvente aujourd’hui un capitalisme de proximité. Plus lent, plus humain, plus résilient. Et si c’était cela, le vrai futur du commerce de centre-ville ?
