Le ministre de la Justice à Lyon : échanges sur l’accès au droit et les réformes en cours
Le Barreau de Lyon interpelle le garde des Sceaux sur une justice « paralysée
Le Barreau de Lyon a interpellé le garde des Sceaux sur la situation ‘atterrante’ des juridictions lyonnaises, dont l’activité est ‘paralysée’ par des délais allant jusqu’à six ans.
Le ministre a pris acte des alertes et s’est engagé à un dialogue, tandis que les avocats réclament des solutions concrètes et immédiates.
Le garde des Sceaux s’est rendu ce vendredi 7 novembre au Barreau de Lyon pour une rencontre à huis clos avec le bâtonnier Alban Pousset-Bougère, la vice-bâtonnière Sara Kebir, et la directrice des Affaires civiles et du Sceau.
Un échange privilégié qui s’est poursuivi par une réunion exceptionnelle du Conseil de l’Ordre, marquant une étape supplémentaire dans le dialogue engagé entre la profession et le ministère.

Mais derrière le ton courtois, les avocats lyonnais ont livré un message sans détour : la justice locale traverse une crise profonde, “atterrante” selon les mots mêmes employés par le Barreau.
Deuxième métropole de France sur les plans économique, démographique et social, Lyon abrite le troisième tribunal judiciaire et la cinquième cour d’appel du pays. Pourtant, les moyens qui lui sont alloués sont très loin de refléter cette réalité. Dix mille dossiers en attente au pôle social du tribunal, quinze mille à la cour d’appel, quinze mois d’attente pour une première audience, jusqu’à six ans dans certaines chambres : un stock colossal, qui paralyse le fonctionnement des juridictions.

« La justice lyonnaise est paralysée », a dénoncé le bâtonnier Alban Pousset-Bougère, appelant la Chancellerie à des solutions concrètes et immédiates.
Pour le Barreau, la question n’est plus seulement celle des délais, mais celle du sens même du service public de la justice.
« Notre mission première — trancher les litiges, rendre la justice compréhensible et accessible à tous — n’est plus assurée », avertissent les représentants des avocats.
Derrière les statistiques, c’est la souffrance quotidienne des magistrats, des greffiers et des justiciables qui s’exprime, dans une institution au bord de la rupture.
Des réformes scrutées et un appel à la vigilance
Le garde des Sceaux a pris acte des alertes et annoncé qu’une convention tripartite entre le ministère, les juridictions et le Barreau de Lyon était à l’étude, en vue d’une signature rapide. Une perspective accueillie avec prudence par les avocats, qui entendent rester vigilants sur les réformes en cours.
Le décret RIVAGE (Rationalisation des Instances en Voie d’Appel pour en Garantir l’Efficience), destiné à fluidifier la procédure d’appel, suscite leurs inquiétudes : la rationalisation ne doit pas se traduire par un accès restreint au juge.
« La réduction des délais passe par des magistrats et des greffiers supplémentaires, pas par une logique purement administrative », soulignent-ils.
Quant au projet de loi SURE (Sanction Utile, Rapide et Effective), le Barreau de Lyon conteste son efficacité réelle sur les délais de traitement et alerte sur le risque d’exclure la victime des procès criminels.
Le ministre; Gérald Darmanin a rappelé que le texte n’était pas encore définitif et suivrait « le cours normal du travail parlementaire », mais les avocats se réservent le droit d’intervenir à chaque étape, au nom des libertés publiques et du respect du contradictoire.
Au-delà de ces débats techniques, le bâtonnier Alban Pousset-Bougère a insisté sur un enjeu plus large : l’accès à la justice du quotidien — civile, sociale, commerciale — devient chaque jour plus difficile.
« Cela n’est pas digne du contrat social qui nous lie », a-t-il martelé.
Avec ses 4 300 avocats, le Barreau de Lyon, deuxième de France, entend poursuivre sa mission de garant de la compétence professionnelle et de la déontologie, d’autorité de contrôle de l’exercice du métier, et de facilitateur de l’accès au droit et à la justice pour tous les citoyens.
Véritable vigie du service public judiciaire, il se veut un partenaire exigeant mais constructif de la Chancellerie.Et, à l’heure où la confiance du citoyen dans la justice vacille, il rappelle que cette exigence n’est pas corporatiste : c’est une question de démocratie.











