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La renaissance économique de la Chartreuse d’Aillon, levier local d’emploi et de rayonnement

Réouverture stratégique en Savoie : la Chartreuse d’Aillon s’impose comme un hub culturel et économique durable en zone de moyenne montagne. Décryptage

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Savoie : la Chartreuse d’Aillon devient un pôle stratégique pour l’attractivité des Bauges
Savoie : la Chartreuse d’Aillon devient un pôle stratégique pour l’attractivité des Bauges

La renaissance économique de la Chartreuse d’Aillon, levier local d’emploi et de rayonnement

Bauges : 15 ans d’investissement public-privé pour relancer la Chartreuse d’Aillon

La renaissance de la Chartreuse d’Aillon structure une offre touristique quatre saisons et crée des emplois durables dans les Bauges.

Il a suffi d’une signature pour remettre en mouvement huit siècles d’histoire. Au pied des Bauges, dans le silence épais d’une vallée oubliée, la Chartreuse d’Aillon change de destin.

Longtemps fermée, brièvement réouverte, puis rendue à l’oubli, cette ancienne abbaye fondée au XIIe siècle va devenir, dans les prochaines années, bien plus qu’un monument restauré : un carrefour entre agriculture, art, science et vie locale.

Le 10 juillet 2025, l’agglomération de Grand Chambéry a confié les clés du site à la société Aillon et d’Ailleurs, pour quinze ans. Derrière ce partenariat public-privé, un pari : faire d’un lieu de silence un lieu de vie.

La Chartreuse rouvre ses portes dès cet été, après une année de fermeture. Le projet, pensé à long terme, veut faire de ce site classé un moteur de transformation pour la vallée.

 La Chartreuse d’Aillon prend un nouveau départSignature d’une convention historiquepour un nouveau pôle culturel et touristique au cœur des Bauges
La Chartreuse d’Aillon prend un nouveau départSignature d’une convention historiquepour un nouveau pôle culturel et touristique au cœur des Bauges

Il ne s’agit pas d’un projet de réhabilitation figé, mais d’une plateforme vivante, pensée pour irriguer l’ensemble du territoire :

  • habitants,
  • scolaires,
  • touristes,
  • artistes et producteurs y trouveront leur place.

C’est une vision de la montagne qui s’exprime ici : durable, habitée, inventive. Loin des modèles usés du tourisme de masse ou de la station mono-saison.

Trois axes structurent cette renaissance

  • Le premier, botanique et agricole, puise dans l’histoire du lieu. Autrefois, les moines chartreux y cultivaient plantes médicinales, fruits, légumes, herbes rares.

Ce patrimoine vivant redevient central. En lien avec le Centre de Ressources Botaniques Appliquées, un jardin historique verra le jour. Une serre chauffée, un séchoir à plantes, un pressoir mobile : chaque outil raconte un geste.

Des espèces anciennes de poires et de pommes de Savoie seront préservées dans un verger conservatoire, tandis que des ateliers et marchés de semences permettront aux visiteurs de toucher du doigt l’intelligence végétale locale.

Rien n’est décoratif : ici, le vivant est productif, et la transmission est aussi importante que la récolte. Des classes vertes seront accueillies toute l’année, avec des ateliers de plantation, d’herboristerie, de transformation artisanale. Une école de la lenteur, enracinée dans la terre.

  • Le deuxième pilier du projet est scientifique et éducatif.

La Chartreuse se trouve au cœur d’un territoire labellisé Géoparc mondial UNESCO. C’est une réserve de paysages, de couches géologiques, d’histoires géographiques invisibles à l’œil nu.

Pour les rendre lisibles, des géofestivals seront organisés : randonnées guidées par des scientifiques, conférences en plein air, explorations sensibles.

Le sol devient une archive, et les visiteurs, des lecteurs en mouvement. Le lieu accueillera aussi un escape game éducatif autour du jardin, des visites immersives avec contes et maquettes, des démonstrations autour de l’eau, de la forêt, du feu. L’ancien four à pain servira de fil conducteur à des journées d’animation, menées par un artisan boulanger du massif.

  • Le troisième axe est culturel.

La Chartreuse ne veut pas seulement transmettre, elle veut créer. Une programmation artistique verra le jour, avec concerts en plein air, spectacles dans la salle des gardes, résidences d’artistes. Les formats seront sobres et accueillants : cent personnes en intérieur, trois cents en extérieur.

La saison s’ouvrira dès le 25 juillet avec une version racontée et chantée de Carmen, portée par l’Ensemble Brins de Voix.

D’autres soirs viendront, mêlant théâtre, musique, arts vivants et parole contemporaine.

Les artistes ne seront pas de passage : certains viendront en résidence, s’immerger dans le lieu, produire sur place, dialoguer avec l’espace, les gens, les plantes, les pierres. La Chartreuse devient scène, atelier, refuge et terrain de jeu.

Derrière cette ambition, une réalité économique. Le massif des Bauges, comme d’autres territoires de moyenne montagne, fait face au recul de l’activité hivernale.

À Aillons-Margériaz, la neige ne suffit plus. Le modèle doit évoluer. Le projet de la Chartreuse s’inscrit dans cette transition : un tourisme quatre saisons, une activité répartie dans l’année, une dépendance réduite à l’aléa climatique.

Cinq à dix emplois directs seront créés, une trentaine d’emplois indirects sont attendus dans les filières connexes :

  • hébergement,
  • restauration,
  • animation,
  • artisanat.

Une association d’intérêt général accompagnera les activités culturelles.

L’objectif est de franchir les 40 000 visiteurs annuels d’ici 2030.

Mais au-delà des chiffres, c’est l’impact territorial qui compte : fédérer les énergies, faire circuler les ressources, tisser des liens.

Le projet est porté par la SAS d’Aillon et d’Ailleurs, fondée par Jérôme et Michèle Salord. Après avoir investi dans une auberge quatre étoiles, des gîtes et un restaurant traditionnel, ils ajoutent à leur engagement une dimension publique, sociale et collective. Ce n’est pas une aventure personnelle, c’est une stratégie territoriale.

Elle s’appuie sur une constellation d’acteurs : la commune d’Aillon-le-Jeune, le Parc naturel régional, des associations comme Jardin Mémoire Montagne ou Aillon-Margériaz Évènements, des producteurs, des artistes, des botanistes, des enseignants. Ce n’est pas un projet vitrine. C’est un projet en réseau.

À Aillon, la Chartreuse ne se contente pas de renaître. Elle change de fonction. De lieu clos, elle devient lieu d’accueil. De lieu sacré, elle devient lieu de lien. Elle n’est plus un vestige, elle est une promesse : celle qu’on peut faire du patrimoine un outil de transformation, du paysage une ressource, de la culture un moteur. Dans une montagne où les repères glissent, c’est déjà beaucoup.

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