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Marie-Josèphe Laurent : “Face à l’IA et au climat, l’avocat reste un acteur stratégique de la démocratie”

Devant ses pairs, la Bâtonnière de Lyon conclut son mandat par une vision forte d’un métier en mutation, mais essentiel à la démocratie.

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Marie-Josèphe Laurent : un cap pour une profession entre rupture technologique et devoir d’exemplarité
Marie-Josèphe Laurent : un cap pour une profession entre rupture technologique et devoir d’exemplarité

Marie-Josèphe Laurent : « L’avocat ne disparaîtra pas, il doit se réinventer »

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Marie-Josèphe Laurent : “Le cabinet d’avocats doit devenir une entreprise… en mieux”

L’avocat, figure d’équilibre dans un monde fragmenté – À l’heure où la profession d’avocat fait face à des bouleversements sans précédent – révolution numérique, exigence de responsabilité sociale, complexification normative – la voix de ses représentants les plus lucides prend une résonance particulière. Le 15 décembre 2023, à l’occasion de la Séance Solennelle du Barreau de Lyon, Marie-Josèphe Laurent, Bâtonnière sortante, a prononcé un discours qui fera date.

Marie-Josèphe Laurent, « À ceux qui prêtent serment, je dis : vous ne choisissez pas un métier figé, mais un mouvement. »
Marie-Josèphe Laurent, « À ceux qui prêtent serment, je dis : vous ne choisissez pas un métier figé, mais un mouvement. »

« Nous sommes devenus indispensables pour créer des ponts entre la norme et le réel, entre l’entreprise et le droit, entre l’humain et la technique. »

Depuis la tribune du Palais de la Bourse, elle a appelé ses consœurs et confrères à affronter les mutations du droit avec rigueur, agilité et cohésion. Un plaidoyer clairvoyant et exigeant pour une profession qui devra conjuguer performance, éthique et engagement sociétal.

Avec son autorisation, nous publions ici l’intégralité de son discours.

AUDIENCE SOLENNELLE
DU BARREAU DE LYON
Marie-Josèphe Laurent : vers un Barreau entrepreneurial, éthique et interconnecté
Marie-Josèphe Laurent : vers un Barreau entrepreneurial, éthique et interconnecté

Le dernier discours d’un Bâtonnier est souvent l’occasion d’un retour sur son action.

S’il fallait évoquer le travail accompli, durant ces deux années, ce serait uniquement pour remercier, de l’efficace et indéfectible dévouement.

  • Mon Vice-Bâtonnier, cher Jean-François BARRE,
  • Les Membres du Conseil de l’Ordre et Représentants du Jeune Barreau,
  • Les Délégués et Présidents de Commissions,
  • L’ensemble du personnel de l’Ordre,
  • Notamment notre Secrétaire Générale, très chère Frédérique,
  • Et plus largement tous les confrères qui participent à la vie collective de notre barreau,

Nous vous avons informés de nos actions au jour le jour, par nos moyens de communication, alors je n’y reviens pas.

La tentation est grande, de porter un regard critique sur :

  • Les dysfonctionnements de la Justice,
  • Les difficultés de la profession,
  • Les atteintes de l’Etat, aux libertés fondamentales, en réponse aux exigences de sécurité de nos concitoyens
  • L’impuissance de l’Etat à faire respecter l’Etat de droit, toujours et en tous lieux, tant sur notre territoire qu’au-delà de nos frontières.

Je voudrais éviter de vous dire ce que vous savez tous.

Il n’est pas question pour moi de nier ces réalités.Mais rien n’est plus inutile que de se contenter de pointer ce qui ne va pas.

On ne doit pas laisser ces difficultés, nous envahir, inhiber notre capacité à relever les défis qui se profilent et nous empêcher de préparer l’avenir.

Nous n’en finissons pas de percevoir les effets de la crise sanitaire, qui a modifié en profondeur notre société dans tous ses aspects, le rapport au travail étant sans doute le plus marquant.

Nous ressentons tous une accélération vertigineuse du changement de tout, ce qui nous déstabilise, car nous n’avons plus le temps :

  • D’assimiler les réformes, qui s’abattent sur nous, comme une pluie battante,
  • De s’approprier les nouveaux outils,
  • D’assimiler les nouvelles façons de faire, de travailler, et même de vivre,

Bref nous n’arrivons plus à suivre. Nous sommes passés d’un processus de transformation à un bouleversement, sans avoir un temps d’adaptation suffisant.

Nous sommes abreuvés d’articles, de livres, d’enquêtes, de documentaires, que sais-je encore, sur les métiers de demain et les métiers qui vont disparaitre.

La fonction ou le métier d’avocat existe depuis l’antiquité, et nous en sommes venus à nous demander si nous allions disparaître.

Au sein du CREDO (notre Centre de Recherche et Développement de l’Ordre) créer par le Bâtonnier DEYGAS et le Vice-Bâtonnier FOREST-CHALVIN, sur une initiative de notre éminent confrère Yves BISMUTH, nous avons passé du temps sur cette question.

L’IA va -elle remplacer l’avocat ? Pourquoi pas le juge et le greffier ?

La réponse à cette question est clairement non.L’avocat sera toujours là pour défendre et sera toujours un des garants de notre démocratie.

Cela étant, il est très probable que l’intelligence artificielle va mettre peu de temps à s’installer dans la panoplie des outils digitaux courants des avocats, pour réaliser très vite et très bien, des actes répétitifs sans grande valeur ajoutée intellectuelle.

Ce nouvel outil va devoir être maîtrisé par les avocats qui devront impérativement être rompus à cette technologie afin de contrôler la loyauté des algorithmes et la pertinence des procédures numérisées et des réponses proposées.

Cela risque d’être difficile pour les avocats « non digitalistes »,

Ce qui devrait les inciter à accueillir à bras ouverts nos jeunes confrères, qui eux sont « digital native ».

Cet outil est à la portée des grands comme des petits cabinets, ce qui va rebattre les cartes.

Nous aurons plus de temps pour être proactifs et créatifs pour nos clients. Nous allons gagner en rentabilité, sur les missions complexes que nous conserverons et nous perdrons certaines missions car le modèle économique sera totalement remis en cause.

Mais l’IA pose de nombreuses questions à propos desquels nos instances nationales et nos Ordres devront être vigilants. Des problèmes éthiques et économiques vont devoir être solutionnés, et une fois de plus nos préoccupations à propos du secret professionnel ou de notre indépendance, vont devoir être examinées.

Mais n’ayez pas peur,

Je vous le dis avec conviction, notre profession a la capacité de surmonter les bouleversements liés à la révolution numérique aujourd’hui et au changement climatique demain et nous pouvons aborder l’avenir avec confiance.

Marie-Josèphe Laurent : « L’optimisme de combat est une stratégie professionnelle »
Marie-Josèphe Laurent : « L’optimisme de combat est une stratégie professionnelle »

NOUS POUVONS ABORDER L’AVENIR AVEC CONFIANCE,

POURQUOI ?

D’abord et avant tout, parce que nous en avons l’Envie, le Désir. La profession a fait sien « l’optimisme de combat », prôné en son temps par philosophe Michel SERRE.

Avec Jean François BARRE, nous avons tenté de le mettre en œuvre durant notre bâtonnat et il semble que la greffe ait prise. Excusez-moi de cet instant d’autosatisfaction qui m’a échappé, désolée !

La profession dans sa grande majorité, a confiance en l’avenir (c’est l’optimisme) et à la volonté d’agir pour réussir professionnellement (c’est l’envie de se battre pour réussir). Nous avons bien en nous les deux éléments de « l’optimisme de combat ».

Oui, nous sommes nombreux à aimer notre métier, qui nous habite et nous nourrit, dans tous les sens du terme !Ce n’est pas moi seule qui le dit, comme une antienne, mais cela ressort clairement de l’étude réalisée en septembre 2023 par l’Institut d’études CSA pour l’Observatoire de la profession d’avocat du CNB.

À l’avenir, les avocats déclarent vouloir pratiquer la procédure participative, l’e-acte, la médiation et l’interprofessionnalité.

Formidable !

Interrogés sur leur façon de travailler, une très large majorité des avocats indique qu’il leur arrive régulièrement de travailler en équipe sur un dossier ou avec un confrère d’un autre cabinet et qu’il leur arrive même de faire appel à des consultants extérieurs.

Voici donc que les avocats pratiquent l’hybridation, prônée par la philosophe Gabrielle HALPERN, que nous avons écouté avec enthousiasme, faire l’éloge de l’’hybridation lors du colloque du CREDO.

Je vous recommande la lecture de son livre TOUS CENTAURES ! Eloge de l’hybridation.

Tous centaures ! Eloge de l’hybridation
Tous centaures ! Eloge de l’hybridation

On est loin de l’image de l’avocat solitaire, tout seul dans son cabinet.

Une nette majorité des avocats interrogés jugent que la nécessité d’innover dans le service rendu au client, la spécialisation et la digitalisation des cabinets, sont autant d’opportunités.

Le dernier volet de l’étude consistait à établir une typologie des cabinets d’avocats.

Typologie des cabinets d'avocats
Typologie des cabinets d’avocats

Utilisant une métaphore sportive, l’étude identifie six types de cabinets.

On peut ainsi distinguer deux groupes :

– Une minorité, a des difficultés à se projeter dans l’avenir :

  • Que ce soit les « golfeurs » : assez expérimentés, souvent âgés, ils n’ont pas envie de se développer,
  • Ou les « équilibristes », expérimentés et plutôt prospères, n’éprouvent pas la nécessité de réfléchir à une stratégie de développement.

-Mais une large majorité, environ 60 %, déclarent avoir une démarche de développement :

  • Que ce soit les « Volleyeurs » : Assez expérimentés et prospères, ils insistent sur le collaboratif et le collectif en interne et en externe et seraient prêts à s’engager dans l’interprofessionnalité,
  • Les « Surfeurs » : Ils sont jeunes exerçant en petits cabinets, leur appétence pour le digital, la publicité, la communication et leur réseautage les conduit à saisir tous les canaux pour faire parler d’eux.
  • Ou encore les « triathlètes » : des individualistes assez expérimentés, un profil d’avocat entrepreneur très marqué.
  • Et enfin les « Ecuries de formule 1 : de grands cabinets qui ont déjà beaucoup investi dans le numérique ; ils ont l’objectif de se développer à l’international mais sont confrontés à des difficultés de recrutement.

Cette étude montre donc que les avocats, en grande majorité, ont confiance en l’avenir et sont optimistes car :

  • Ils se projettent,
  • Ils ont une démarche stratégique et entrepreneuriale,
  • Ils sont disposés à s’emparer de toutes les opportunités qui nous sont offertes et à investir,

A l’inverse, sont pessimistes, ceux qui adoptent une posture de retrait et de méfiance à l’égard de tout et de tous, ils attendent immobiles face à l’avenir.

« Notre exemplarité légitime notre parole »
« Notre exemplarité légitime notre parole »

NOUS POUVONS ABORDER L’AVENIR AVEC CONFIANCE PARCE QUE :

Nous bénéficions de la confiance de nos clients et des magistrats. Cela nous a été récemment confirmé, lors du récent colloque du CREDO et je remercie à cet égard Madame la Première Présidente de la Cour d’Appel de Lyon Catherine PAUTRAT, pour les propos chaleureux.Nous sommes une profession réglementée, forte de nos règles déontologiques, qui pour la plupart sont édictés au bénéfice de nos clients.

Nos ordres assurent la couverture en responsabilité de tous les avocats et veillent au respect de nos obligations professionnelles vis-à-vis de nos clients, ce qui participe à la confiance qu’ils nous portent.

Les magistrats, dans leur grande majorité, sont attachés à notre rôle d’Auxiliaire de justice et la confiance qu’ils nous portent, implique de notre part, d’assurer la défense de nos clients en toute indépendance, mais avec probité et dignité.

Je connais les critiques de certains d’entre nous sur le terme « Auxiliaire de Justice », mais nous sommes des « Auxiliaires + », car indispensables et cela ne fait pas débat.

NOUS POUVONS ABORDER L’AVENIR AVEC CONFIANCE PARCE QUE :

Le développement du Droit et les besoins de Droit ne sont pas près de s’arrêter. Kami HAERI dans son rapport sur l’avenir de la profession de 2017, indiquait qu’en 20 ans, le marché du droit avait doublé et que le chiffre d’affaires global des avocats avait triplé.

La profession ne s’est pas encore saisie des gisements d’activité qui s’offrent à elle.

Nous n’utilisons pas assez le Droit européen et nous ne saisissons pas assez les juridictions européennes. Les avocats déclarent être prêts à la pratique des MARD, c’est heureux et important.

Nous avons un rôle stratégique à jouer dans ce virage pris par l’institution judiciaire, et ce, quelques soient les doutes que nous pouvons avoir sur la façon de parvenir aux objectifs voulus par la Chancellerie, en l’absence de moyens dédiés.

Je sais qu’une partie de la profession critique cette limitation de l’accès du justiciable à son juge, par la pratique des MARD. Mais nous n’avons pas le choix, la nature a horreur du vide, et, si nous laissons passer ce train, d’autres que nous, le prendrons ; il y a du monde sur le quai.

Nous devons nous emparer des MARD et réussir, comme nous l’avons fait pour le divorce par acte d’avocat.

N’oubliez pas que nous sommes les Monsieur et Madame JOURDAIN des MARD, que nous pratiquons depuis des décennies, par les accords et transactions dont nous sommes les artisans au quotidien.

En effet, l’acronyme MARD n’existait pas encore que nous les pratiquions déjà, ne serait-ce que pour les divorces par consentement mutuel (1975).

Prenons la main sur les MARD : concentrons-nous sur la recherche d’accords, en dehors de toute procédure, puis faisons homologuer si besoin.

Marie-Josèphe Laurent : un discours de passation pour penser l’avenir du droit
Marie-Josèphe Laurent : un discours de passation pour penser l’avenir du droit

Le réchauffement climatique va entraîner un bouleversement complet des règles de responsabilité et d’indemnisation des préjudices.

D’importants procès ont déjà eu lieu et d’autres vont nécessairement avoir lieu.

Les enjeux vont être considérables et les avocats joueront un rôle important, ce qui nécessitera un haut niveau de compétence.

Enfin nous devons travailler à « adoucir » notre Droit.

Dans son article paru en janvier 2020, « Gouverner la mondialisation par le Droit », Mireille DELMAS MARTY a, une fois encore, démontré la puissance de sa pensée de philosophe et le caractère prémonitoire de sa réflexion.

Notre pays centralisé et à la tradition répressive a toujours privilégié un « Droit dur » (Hard Law) dont l’application nécessite des moyens dont ne dispose pas notre institution judiciaire et dont les résultats sont souvent décevants.

Mireille DELMAS MARTY évoquait la notion de « Droit doux » (« Soft Law ») qu’elle associait au concept de « Droit Flou ».

Le développement de la compliance en est un bon exemple. Cette démarche intellectuelle chère aux Anglo-Saxons est très prégnante dans la méthodologie mise en œuvre par la C E D H.

Elle laisse au Juge de larges pouvoirs d’appréciation tout en respectant des critères adaptatifs bien définis.

Ce « Droit doux » commence à se développer en matière pénale notamment avec la reconnaissance préalable de culpabilité.

Notre profession doit favoriser cette émergence.

Une réflexion a été menée au sein du Conseil National des Barreaux à propos d’applications possibles dans d’autres domaines de notre Droit (Droit des affaires Droit du travail ou de la Famille) pour formuler des propositions auprès du Gouvernement et des Parlementaires.

Les politiques, raisonnant à court terme, sont certes plus enclins à imaginer des mesures autoritaires et médiatiques, dont l’effet supposé doit être rapide et mesurable, mais qui la plupart du temps, ne peuvent être appliqués du fait des difficultés que j’évoquais plus haut.

L’intérêt de l’adoucissement du Droit est multiple :

  • Simplifier et fluidifier les procédures, alléger les enquêtes policières et permettre la recherche des preuves par toutes les parties, raccourcir les délais de traitement donc économiser des moyens, ce qui devrait ravir Bercy et la Place Vendôme,
  • Assurer le respect de la vie privée et de la vie des affaires, tout en conciliant cette préoccupation avec la liberté d’information des journalistes,
  • Promouvoir la réinsertion et diminuer les cas de récidive par un suivi efficace et personnalisé ne passant pas systématiquement par la case prison.
  • En finir avec une certaine « victimo-bobologie des plaignants ». Par une pédagogie appropriée, nous pourrions convaincre certains clients à renoncer dans une procédure longue et couteuse dont l’issue est souvent aléatoire, voire décevante, moyennant un règlement amiable.

La mise en œuvre du droit doux, nécessite des avocats compétents et disponibles, d’où l’intérêt de l’IA qui se chargera des tâches ingrates.

Je pourrais multiplier les exemples, vous l’avez compris, le ou plutôt les marchés du droit, vos domaines d’intervention, vos champs des possibles, appelez-les comme vous voulez, sont immenses et cela justifie votre optimisme.

Ces nouveaux marchés, concernent tant les particuliers, que les entreprises ou les organisations au sens large.

Ces champs d’intervention nous sont ouverts à la condition que nous ayons l’audace de nous en saisir et de nous former pour acquérir la compétence nécessaire pour traiter, les dossiers qui nous seront confiés.

Non seulement nous ne disparaîtrons pas, mais notre profession va continuer à se développer.

Pour autant, l’avenir ne sera radieux que si nous nous donnons les moyens de notre réussite, car, et c’est normal, rien ne nous sera donné.

NOUS REUSSIRONS SI :

Nous poursuivons notre transformation à un rythme plus soutenu car nous sommes en plein bouleversement.

Marie-Josèphe Laurent : une vision lucide et offensive pour un Barreau en transition
Marie-Josèphe Laurent : une vision lucide et offensive pour un Barreau en transition

POUR CELA :

Nous devons, être à l’écoute des besoins de nos clients.

Nous devons, repenser notre formation.

Ne pas nous contenter de connaitre le droit, tout le monde peut l’apprendre et certains croient le faire en 3 clics sur Internet. 

Nous former aux compétences douces, autrement appelées « soft kils », aux sciences humaines,

Travailler notre force mentale et développer notre créativité, quels que soient notre âge et notre expérience, pour tenir dans la durée face au stress.

Pour exercer une profession aussi difficile, nous devrions avoir une formation initiale à la hauteur des grandes écoles ; on en est loin !

Nous devons, appliquer dans nos cabinets les standards de gestion, comme n’importe quelle entreprise qui veut exister et se développer.

Nous devons, accepter de nous soumettre aux règles de la RSE et de la conformité.

  • Il est fini le temps où les avocats donnaient à la barre des leçons d’éthiques au monde entier et passé la porte de leur cabinet, considéraient que tout cela ne leur était pas applicable.
  • Cela implique pour chacun d’entre nous de lutter contre le harcèlement, la discrimination, les inégalités hommes-femmes.

Notre serment nous oblige à l’exemplarité,

Notre exemplarité, légitime notre parole.

Si nous ne voulons pas modifier nos comportements inappropriés par vertu, faisons-le par intérêt. 

Oui, par intérêt, car. la modification de ces comportements participe à la performance d’une entreprise et donc à la performance d’un cabinet d’avocats.

Non seulement cela améliore notre capacité à attirer des talents, mais également à les conserver.

La question du manque de collaborateurs se réglera ainsi d’elle-même.

Nous devons, structurer nos cabinets.

Les statistiques sont invariables sur ce sujet, les confrères qui exercent en sociétés, ont des revenus sensiblement plus élevés, et notamment jusqu’en fin de carrière.

Il y a trop de confrères qui exercent à titre individuel et qui se trouve en difficulté à un moment de leur carrière.

Nous devons, favoriser l’accès au droit de tous et notamment des plus vulnérables.

ll est temps que notre profession songe sérieusement, notamment dans les grands Barreaux à favoriser l’émergence de grands cabinets spécialisés en droit des personnes, véritables « cliniques du conseil et de la défense » à l’adresse des particuliers.

Force est en effet de constater que le droit des personnes est essentiellement pratiqué par des avocats, qui exercent de façon individuelle, dans des conditions plus ou moins précaires, ce qui est une source de risque tant pour eux, que pour la clientèle.

A l’image de ce qui existe au Canada, les coûts de fonctionnement de ces structures pourraient être répartis entre :

  • L’Etat (comme alternative à l’Aide Juridictionnelle), 
  • Les collectivités, 
  • Les Ordres, 
  • Et les justiciables en fonction de leurs revenus.

Ces cabinets regrouperaient toutes les professions nécessaires pour assurer une offre globale, avocats, notaires, psychothérapeutes, médiateurs…

Voici encore un exemple d’hybridation possible.

Les avocats intéressés par ce mode d’exercice, pourraient ainsi concilier compétence de haut niveau, conditions de travail optimale et revenus satisfaisants.

Et là vous allez m’objecter, quid de l’indépendance.

Parlons-en de l’indépendance, mise à l’épreuve de nos dépendances économiques vis-à-vis de nos clients, vis-à-vis de l’état pour ceux qui interviennent largement à l’AJ!

Il s’agit là d’un thème de réflexion intéressant, pour nos séances des « jeudis de la déontologie ».

En conclusions :

Il est évident qu’un cabinet d’avocats doit être une entreprise comme les autres, mais en mieux :

  • En mieux parce que les avocats sont évidemment compétents, mais ce sont des êtres singuliers, qui doivent être aussi bons juristes que bon « legal prompteur », avec une intelligence émotionnelle forte.
  • En mieux, parce que les avocats agissent dans le respect de leur serment et de leur déontologie.

Nous n’avons besoin de rien d’autre pour nous guider dans l’exercice de notre profession.

Pour clore mon propos, je tiens à souligner l’importance pour chacun de nous d’être proche de notre ordre et de le soutenir :

  • En votant massivement à toutes les élections qui vous sont ouvertes tant au niveau local que national, et sur ce point, je ne suis pas très contente de mon barreau,
  • En vous engageant dans « l’ordinalité », en vous présentant aux élections du conseil de l’ordre, RJB ou au bâtonnat, et là encore, un barreau de 4.000 avocats, devrait normalement présenter plusieurs candidats par poste à pourvoir et à chaque scrutin

En vous engageant dans l’action collective au sein des commissions et en participant aux colloques, rencontres et toutes les manifestations que l’ordre organise pour vous et avec vous, pour que l’intelligence collective rejaillissent sur tous.

Nous avons besoin d’un ordre fort, pour vous accompagner face aux défis qu’il faut relever et assurer toutes les missions qui lui incombent, dans l’intérêts des avocats, des citoyens et des entreprises.

Rejoignez-nous nombreux pour faire votre part, comme des colibris.

Mon petit message personnel pour finir

A la fin de la Seconde Guerre Mondiale, s’adressant à de jeunes gens qui s’interrogeaient quant à leur avenir, l’Abbé Pierre leur déclara :

  • « Le chemin de la vie, c’est une dé-sillusion enthousiaste » 
  • Il évoquait la nécessité d’ouvrir les yeux pour que vienne l’enthousiasme.

Il expliquait que la dé-sillusion :

  • N’est pas le renoncement,
  • Mais la lucidité, face aux défis auxquels on est confrontés.

Alors en quittant ma fonction de Bâtonnier, après l’optimisme de combat, je vous propose de vivre cette dé-sillusion enthousiaste.

Marie-Josèphe Laurent : une profession à réinventer entre performance, humanisme et responsabilité
Marie-Josèphe Laurent : une profession à réinventer entre performance, humanisme et responsabilité

Ouvrons les yeux sur tous ce qui nous attend avec confiance et lucidité. Et poursuivons notre chemin avec enthousiasme.

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