DJ Fly au Delicatessen à Lyon : une rencontre inédite entre street food de chef et culture hip-hop

Ce soir-là, dans les rues étroites du 1er arrondissement de Lyon, un parfum inhabituel flottait du côté de la rue de Savy. Le Delicatessen, bastion bien connu des amateurs de viande, troquait ses pièces de bœuf contre des beats millimétrés.

Loin de ses habitudes carnées, le lieu accueillait une soirée privée sous haute fréquence. Aux platines, DJ Fly, maître incontesté du scratch, livrait un set exclusif après une ouverture signée Louve.

En cuisine, la street food montait d’un cran : hot-dogs inspirés, saveurs brutes, tension gourmande. Une soirée où l’on servait du son aussi affûté que la lame d’un chef.

À 19h, vendredi 13 juin, les portes s’ouvrent discrètement. Pas d’affiche tapageuse, pas de queue visible. L’ambiance est à la confidence. Quelques initiés se faufilent dans le lieu métamorphosé. 

À l’intérieur, l’éclairage rougeoyé fait ressortir les lignes industrielles du décor.

La vitrine à viandes a disparu, remplacée par un bar plus animé qu’un comptoir de fin de service. Le Delicatessen, ce soir, s’est mué en club éphémère. Derrière les platines, Louve enchaîne les morceaux avec une élégance nerveuse, entre basses rondes et montées lentes.

Elle chauffe la salle sans l’épuiser, prépare le terrain. Le public, trentenaires urbains, amateurs de musique exigeante, foodies sans clichés, oscille entre écoute attentive et relâchement festif.

Puis vient DJ Fly. S’il y a une figure à laquelle Lyon peut se raccrocher dans le monde du turntablism, c’est bien lui. Quadruple champion du monde DMC, collaborateur de De La Soul, Cut Killer, Busta Rhymes, il est l’un des rares DJ français à avoir hissé le scratch au rang d’art total.

Ce soir, il ne fait pas un show : il raconte une histoire. Entre hip-hop, soul, électro, funk, rock et musiques de films, son set est une ligne de fracture temporelle, un kaléidoscope sonore où chaque transition est une découpe nette.

Il ne joue pas : il cisèle, il raconte, il percute. Rien d’ostentatoire, mais une maîtrise totale, organique, qui fait communier la salle.

Dans les mains, certains tiennent des hot-dogs, mais pas n’importe lesquels. Pour l’occasion, la maison a revisité son registre. Exit les pièces de viande en vitrine : le Delicatessen propose des versions haut de gamme du snack de rue new-yorkais.

Pain brioché, saucisse de Toulouse charnue, condiments vinaigrés, sauce maison ; ou effiloché de bœuf longuement confit, fumé comme dans un barbecue texan, twisté par des oignons croustillants. Une street food de chef, pensée pour se manger debout, au rythme du beat, sans trahir l’ADN du lieu.

Chaque bouchée est dense, relevée, calibrée pour marquer. Comme le son.

Tout dans cette soirée évoque la friction des mondes : le raffiné et le brut, le savoir-faire culinaire et l’énergie brute de la scène, l’artisanat et le scratch. Ce n’est pas un concert, ce n’est pas un dîner, ce n’est pas un club.

C’est une expérience. Quelque chose de plus rare, un peu clandestin, pensé non pour être vu mais pour être vécu.

Le public le comprend. Il ne photographie pas, ne filme pas. Il est là, tout simplement.

Quand minuit sonne, DJ Fly termine son set sans fanfare. Un dernier sample, une boucle qui se dérobe, et le silence revient, comme un rideau qui tombe. Les convives s’attardent un peu, discutent, puis s’éclipsent.

Ce qu’ils ont vécu n’est pas un événement à poster, c’est un moment à garder. Une nuit où Lyon s’est souvenue qu’elle peut être à la fois capitale de la chair et du son. Une ville où, parfois, le gras et le groove ne font qu’un.

« Ce n’était pas juste une soirée, c’était une expérience complète, du son aux hot-dogs revisités, tout était au top ! », s’exclame un spectateur conquis. 

« Du côté du Delicatessen, Brice Fournier ajoute : Notre pari était de transformer l’essai, de prouver qu’on peut allier excellence culinaire et événementiel pointu. Voir le public se l’approprier avec autant de ferveur est la plus grande des satisfactions. »